Dans la vie, on a besoin d’oxygène, de trucs à boire et à manger. Mais aussi de ces choses qui vous secouent l’imaginaire, vous font rêver, vous donnent envie de créer, ou tout simplement d’aller de l’avant. Ce post est une réponse à l’une des réalisation de cette personne, qui mériterait à elle toute seule une place en tête de la liste des déclics existentiels, tant sa présence fait du bien à l’Internet francophone et aux gens en général (Merci Solange).
Voici un top 5 (non exhaustif, et parce qu’il a fallu choisir) de ces éléments qui, pour moi, ont fait la différence.
1. L’Écume des jours, Boris Vian



@Magdeleine Bonnamour – Studio LGF/ @L’Écume des jours, Michel Gondry – Studio Canal / @L’Écume des jours, Charles Belmont – Chaumiane
Ce qu’il y a de fascinant avec les livres que vous lisez et adorez pendant vos jeunes années, c’est leur capacité à vous coller à l’âme pour l’éternité. L’Écume des jours est l’un de ces romans qui a façonné mon imaginaire pour tout un tas de raisons évidentes. Au-delà de la romance au cœur de l’histoire, il y a cette force de voir le beau et le drôle dans l’insignifiant, le poétique dans l’atroce. Vian parvient à rendre la tristesse sublime, à vous donner envie d’avoir un piano cocktail chez vous et de prendre soin des souris dans vos placard. Et puis il y cet extrait que l’on ne saurait que trop citer et qui résume tout : « Il y a seulement deux choses : c’est l’amour, de toutes les façons, avec des jolies filles, et la musique de La Nouvelle Orléans ou de Duke Ellington.«
2. Scott Pilgrim vs the World, Edgar Wright
@Scott Pilgrim vs the World, Edgar Wright / Universal Pictures
Oui oui, on peut dire que nous aimons ici les écarts de genre, car si les livres sont les profiteroles de mon existence (Le sel et le café, ca va 5 minutes), la pop culture et le cinéma en sont les éclairs au chocolat. Si j’ai dévoré l’excellent comic de Brian O’Malley, c’est toutefois son adaptation cinématographique qui m’a permis de plonger dans son univers . Ce film est non seulement une ode délicieuse à l’univers du jeu vidéo (Karim Debbache en parlait déjà bien mieux que moi à l’époque dans sa série Chroma), mais il est de ceux qui ont marqué les premiers pas de l’adulte que je souhaitais être : un pied dans la réalité, le reste dans une armoire à bonbons. Lorsqu’un de mes proches traverse une crise existentielle, ou a le malheur de prononcer la phrase : « C’est quoi le film qui te fait du bien dans n’importe quelle circonstance? », il y a de forte chance qu’il se retrouve coincé avec ma personne survoltée hurlant : « Il faut que tu regardes Scott Pilgriiiiiim! » (Suivi par une chorégraphie de la honte sur la BO du film, et plus particulièrement le titre Black Sheep du groupe Metric. Je vous laisse découvrir sa version acoustique et l’histoire fort sympathique qui lie ce morceau au film).
3. There is a light that never goes out, The Smiths
@The Queen is dead, The Smiths // Morrissey, Johnny Marr /Rough Trade
Il était impossible de faire un choix d’album de The Smiths. Un non sens absolu pour ma personne, comme celui de me demander de choisir entre une tarte aux pommes et un magret de canard avec des patates (Pure hérésie). Après avoir gémi en me disant que « Please please let me get what i want » ou Ask devait figurer dans ce listing, j’ai fini par trancher (En sanglotant intérieurement. Nan, en vrai, j’ai juste repris un bout de fromage). Morrissey fait partie de mes dilemmes artistiques. J’ai beau savoir que ce dernier préfère problablement les chatons aux êtres humains, il est le créateur de ces paroles qui me feraient voir la lumière au fond du gosier d’un chameau (Pourquoi pas me direz-vous). « There is a light that never goes out », c’est un peu comme cet ami qui traverse la moitié de la ville la nuit pour venir vous faire manger des gâteaux quand rien ne va. Ou boire des verres jusqu’au petit matin en refaisant le monde. Ou cette marche que vous prenez un jour de pluie dans un pays inconnu, avec un sentiment de liberté terriblement bon au fond de l’estomac. Il suffit que j’entende la voix de Morrissey « And if a double-decker bus /Crashes into us/To die by your side/Is such a heavenly way to die » pour passer de l’état misérable d’un blob en pyjama à celui de Wonder Woman (Mais sans la cape qui gratte).
4. The Art of Asking, Amanda Palmer
@Ted talks
Dans le chemin de la création, il y a des gens qui vous inspirent, qui vous sont proches. Soit parce que vous partagez des tas de choses concrètes ensemble dans la vie de tous les jours (Des trucs qui font rire, des trucs qui font pleurer, des trucs insignifiants, des trucs importants, des choses de la vie quoi), ou parce qu’ils accompagnent par leur art votre vie de tous les jours (Quand vous riez, quand vous pleurez, dans les choses insignifiante, dans les choses importantes). Amanda Fucking Palmer est juste un cadeau d’authenticité brute, une parfaite imperfection. Elle est apparue dans ma vie au hasard d’un concert choisi de manière aléatoire aux alentours de 2007, dans une de ces salles bordelaises à la douce odeur de pierre mouillée, de clopes et de bière qui colle (Feu El Inca) . Un type à l’entrée m’a demandé si je venais voir Amanda. Je lui ai dit que je n’avais aucune idée de qui était Amanda. Deux heures plus tard, je voulais tout savoir sur Amanda. Elle est de celles qui vous retirent le syndrome de l’imposteur artistique à coup de pioches, tout en démontant cette p**** de didacture du nombre. Deux, dix, vingt auditeurs, c’est une foule. Peu de gens réalisent qu’avoir ce nombre de personnes, initialement étrangères, qui comprennent vraiment votre message, soutiennent votre art, c’est immense. Que d’aimer ce que vous faites, d’oser le partager, sans filet, sans retenue et surtout d’avoir une réception de quelques bras pour vous rattraper est un pur miracle. Du passage d’Amanda sur Ted Talks est né le livre The Art of Asking, mais également un podcast audio, The Art of Asking Everything. Amanda est la voix que j’avais envie d’entendre, au moment où il le fallait, parfaite pour envoyer les vieux démons au tapis. Ceux qui existent dans vos têtes ou ailleurs, qui vous disent que quoi que vou fassiez, « cela ne sera pas assez » , qui vous empêchent de juste »faire » pour tout un tas de raisons. Et qu’il suffit de dégager à coup de grands coups de pieds dans le fondement une bonne fois pour toute.
5. Transfert, Slate.fr
@Transfert / Slate.fr
Lorsque j’étais enfant, ma mère avait créé un conte de toute pièce, inspiré de notre vie de tous les jours. Caféine, l’héroïne, avait mon âge, et vivait des aventures épiques, entourée de ses parents, Gros Grain de Café et Maman Grain de Café (Ma mère n’a jamais pu démarrer une journée sans un bol de 6 litres de pétrole bien serré. J’ai toujours considéré ce breuvage comme la déception ultime des sens. Le café appartient au monde des adultes. Qui n’est pas totalement le mien). Chaque soir, je l’écoutais avec attention alors qu’elle me narrait ces histoires de l’ordinaire, où un incident de vase cassé prenait des tournures romanesques, où les chiens étaient des dragons qui renversaient leur croquettes partout, où Gros Grain de Café se demandait pourquoi son slip avait changé de couleur au lavage (Un acte terroriste de la fée Maléfique des Slips) . Transfert, c’est mon conte d’adulte du soir, mais ancré dans la réalité. J’y retrouve le plaisir de la narration orale, de la parole brute et du romanesque qui se cachent derrière ces témoignages de la vraie vie. Comme lorsque j’attendais, impatiente, la clé du mystère des slips décolorés de Gros Grain de Café. Sans les histoires de ma mère, je n’aurais jamais peut-être autant plongé dans l’univers de Transfert. Et sans Transfert, je n’aurais jamais dévoré autant de podcasts. Ou même eu envie d’en faire.
Un commentaire sur « Ces déclics culturels qui sauvent la vie (ou du moins la mienne) »