Ce titre est d’une longueur à pleurer, je sais.
Pour ceux qui en auraient déjà perdu un œil, sachez que je vous présente mes plus plates excuses, et vous propose les solutions suivantes :
1. Vous armez de patience et de collyre.
2. Vous ralliez au fait que ce post à l’intitulé alambiqué recèle un certain sens du mystère, tout comme sa créatrice. (Spoiler : Cet article n’est pas mon idée. Vous sentez la fraude ? )
3. Considérez que le temps est une denrée précieuse et que, par conséquent, vous pouvez consciemment choisir de continuer votre lecture ou d’aller vous envoyer un toast de pâté à la place (je vous recommande de combiner les deux).
Si vous êtes toujours parmi nous, et que vos yeux ont survécu, sachez que vous n’avez vu que la partie émergée de l’iceberg. Parce ce post aura droit à une deuxième partie. (Spoiler : Toujours pas mon idée, mais vous allez comprendre.)
Il a été rédigé en écoutant beaucoup de Mark Knopfler, accompagné de six litres de thé (je pense très sincèrement qu’une deuxième vessie est en train de croître à l’intérieur de moi), et après une dégustation de Mouna (soit la Rolls Royce de la brioche… Et sachez que la brioche est un sujet sur lequel je plaisante peu).

Les choses étant posées, je vous invite donc à prendre place (si, si, on va passer un bon moment ensemble).
» Cher A.
J’étais sur le point de m’attaquer à une œuvre de grande envergure, soit la dégustation d’un Paris-Brest en dessert, lorsque ta missive (NDLR : Les lecteurs vont s’imaginer que nous communiquons sur des bouts de parchemin en papyrus alors qu’il s’agissait d’un whatsapp) m’est parvenue. J’ai manqué tout d’abord de m’étouffer avec de la crème pralinée. L’instant d’après, l’allégresse a étreint mon petit être (Ou alors il s’agissait de l’augmentation soudaine de mon niveau de sucre dans le sang).

Edit : 10 films que tu n’as pas vu qui vont changer ta manière de penser »
Alors oui, comme le laisse entendre ces premières phrases, je me suis bel et bien mise à manger à l’heure irlandaise. Je cesserai donc de moquer les habitudes liées à ta culture, soit celle de prendre tes repas à des heures dignes d’un octogénaire. Mais comme tu le sais déjà, les français sont moqueurs, ce qui est une tactique pour détourner l’attention du fait que ma nation érige le culte du lait moisi au rang de raffinement suprême.
Cher A., notre amitié a toujours reposé sur une base fondamentale : le principe de l’opposition complémentaire.
Ta taille te permet d’atteindre n’importe quel paquet de biscuit en hauteur, lorsque mes pauvres 1,60 mètres me condamnent à vivre au niveau des aisselles des gens dans le métro.
Après une orgie de gâteaux, à laquelle je peux parfois te contraindre à participer, le remord s’empare assez facilement de ta personne, quand j’en suis encore à rêver d’un bain de cheesecake (ce qui ne t’empêche jamais de rejoindre Sugarland lorsque le moment fatidique est venu).
Tu n’aimes pas planifier les choses. Si Dieu existait, il prendrait pour moi la forme d’une liste (il faut imaginer que je tiens une liste des spécialités pâtissières que je dois tester d’ici fin 2021, et des langues dans laquelle je dois apprendre le mot ornithorynque. Chacun sa croix).
S’il neige, il y a de forte chance qu’en contemplant un flocon, tu te demandes si ceux représentés pour les décorations de noël sont fidèles à la réalité (spoiler : la réponse est non, Gaston) . Et moi, j’en serais probablement à me demander combien de concours de bonhommes de neige existe dans le monde (Spoiler : La question est toujours en cours d’investigation).
Les anniversaires sont pour toi un jour un peu comme les autres, quand ils sont pour moi le jour rêvé où le miracle s’opère, où le temps s’inverse pour me ramener au pays de mes 7 ans (Et avoir une bien belle excuse pour manger et boire comme un goret).
Le principe de polarité, dans toute sa splendeur. L’équilibre entre le brocolis et le diabète.
Oui mais voilà, c’est alors que nous étions en train de sauver le monde de nous livrer à une dégustation de wok de brocolis, justement, (oui, oui cela arrive) que tu as lancé : « Je n’aime pas trop regarder des films. Enfin, si, mais souvent, je m’ennuie. »
Je pense en être restée soufflée, du brocolis tristement coincé entre les dents, songeant que cet équilibre allait être rompu à tout jamais, et que, très probablement, la porte des enfers allait s’ouvrir sous nos pieds (vous sentez la tension dramatique, hein ?).
Ce que j’appréhende beaucoup mieux, après une pandémie, des départs, des choses qui finissent, et des choses qui commencent, c’est l’infinité des déclinaisons qu’il existe en chaque personne dans la manière d’appréhender notre réalité, de connecter les points qui pour nous ont du sens (Merci, Amanda Palmer).
Ma manière de connecter les points, elle doit passer par imaginer qu’un nuage à la forme d’un canard. Et c’est seulement par ce biais qu’il me viendra à l’esprit de chercher à savoir ce qu’est un nimbostratus.
J’ai un besoin viscéral que l’on me raconte le ressenti des choses, des histoires. D’imaginer ce que cela fait d’avoir un alien dans son placard, de partir à la recherche d’une arche perdue en pleine guerre mondiale (tout en ayant plus peur des serpents que des nazis), de savoir que si jamais je perdais mes mains, il existe toujours l’option de me greffer des sécateurs pour séduire la fille la plus fantastique du coin (surtout si elle s’appelle Winona Rider).
Parce que sinon, ET n’est qu’une petite immondice fripée venue faire peur aux enfants et squatter leur chambre, Indiana Jones une maîtresse de donjon SM qui s’ignore, et Edward aux mains d’argent un pauvre raté qui a raté sa chance de prendre la place de Robert Smith.
Le cinéma, l’art en général, c’est un peu ce doudou existentiel qui fait que la réalité a pour moi moins d’aspérités, que le monde, même s’il est un peu chaotique, plein de chiffres qui me donnent de l’urticaire, de faits établis, de choses que je ne comprends pas, dispose d’une autre porte d’entrée qui m’est plus accessible.
Alors forcément, quelques années et des brouettes après cette conconversation autour d’un wok, tu peux facilement te faire une idée des cris de hamster hystérique que j’ai pu pousser en songeant à ta requête.
Cher A., voici donc la liste des films que je n’ai pas encore vus, mais qui, je l’espère, m’ouvriront d’autres manières de connecter les points de ma réalité, de mieux voir le monde par les yeux de ceux qui tente de l’interpréter avec leur imaginaire.. D’autres manières d’être surprise, bousculée, rassurée, d’apprendre, désapprendre. Ou tout simplement d’échapper à ce grand n’importe quoi qu’est le monde le temps de quelques heures.
Joyeux anniversaire, sean-ghabhair.
P.s : À l’heure où j’écris ce post (17h30), je rigole déjà en douce en pensant que tu as déjà dû manger comme un vieux papi. »
- Prova d’orchestra, Fellini / Répétition d’orchestre
De Fellini, je sais qu’il est à l’origine de la Dolce Vita. Et je n’ai jamais vu la Dolce Vita. Pas plus que tout autre film de Fellini. J’ai passé 35 ans de mon existence à ignorer celui qui est défini comme l’un des grands maîtres du cinéma italien (voire du cinéma tout court).
Vous vous demandez ce qui a bien pu amener à faire figurer ce choix en pôle position de ma liste ?
Vous n’allez pas être déçu…
Le déclic : Il s’agit de cette citation (alors que je recherchais une recette de pâte au gorgonzola) :
« La vie est une combinaison de pâtes et de magie. »
« LA VITA È UNA COMBINAZIONE DI PASTA E DI MAGIA.«
Chacun a les déclics culturels qui lui ressemblent me direz-vous…. Mais qu’un type de Rimin, qui a remporté 5 Oscars, été à l’origine d’un language cinématographique qui a fait date et emblématique du renouveau d’un certain cinéma italien, choisisse un plat de tortellini pour exprimer sa conception de la vie et de l’art, c’est tout simplement…. le genre de poésie absurde qui me fait l’effet d’un carlin qui louche (= un attrait irrésistible).
Je sais que s’intéresser au cinéma, c’est aussi plonger dans son histoire, ses codes, ce qui l’a modelé. Ce qui demande une certaine disposition d’esprit qu’un déclic peut faciliter (comme les fameux tortellini).
Ce que j’attends de ce visionnage : L’histoire du film a de quoi répondre à l’un de mes besoins personnels du moment : celui de voir quelqu’un capable de mettre un peu d’onirisme et d’humour absurde dans un certain chaos politique et social. Et comme toute Fellinienne débutante, sans doute une leçon de cinéma (j’avoue m’être un peu endormie sur mes productions Netflix de love story coréennes, forts absurdement divertissantes au demeurant. Je vous parlerai peut-être un jour de cette addiction étrange).
2. Mean streets, Martin Scorsese
Scorsese et moi, c’est une longue relation faite d’ambigüité et de maîtrise de vessie (on y revient toujours).
En 2004, j’avais bavé d’ennui et d’inconfort devant Aviator. L’inconfort venait plus de mon obstination à refuser d’aller faire pipi pendant la projection que du film lui-même.
Parce que selon l’un de mes vieux principes tordus, on peut bâfrer du pop-corn en toute quie´tude (j’entends déjà les extrémistes anti pop-corn se lever. Je vous aime les amis). Cependant, faire une pause pipi pendant un film qui dure 2h50 était une règle à laquelle je ne dérogeais pas (ce qui aurait pu me permettre de récolter un partenariat avec la version de Pampers des adultes. Veuillez pardonner mon inculture en matière de marques de couches pour incontinence). Comme si l’appréciation d’une œuvre devait passer par un engagement sans faille, au péril des règles de santé les plus élémentaires (entre l’obsession des tortellini et la dictature de la vessie, je pense que vous ne regrettez pas d’être venus).
Mais auparavant, j’avais eu l’expérience de Taxi Driver, une histoire de violence ordinaire, assez banale sur papier, mais filmée comme nulle autre. L’image mentale que je m’étais construite de New-York plus jeune, c’était celle de Scorsese dans ce film : une ville pleine de bruit, de violence, de vie, peuplée de gansters, de De Niro et ses lunettes, de Jodi Foster et ses chaussures rouges, son chapeau trop grand, et ses airs d’adolescente perdue. Et ce que j’avais aimé par dessus-tout, c’est cette manière de traiter cette zone grise, où chaque personnage n’est pas uniquement un sale type ou une oie blanche, la question qu’il semblait poser sur le fait de se sentir appartenir à ou exclu du monde.
Après avoir récemment passé 3h30 en compagnie de The Irishman (que j’ai aimé. Mais sans doute parce que depuis, je suis devenue plus sympa et organisée avec moi-même, et que ma consommation de thé n’a fait que s’accroître. Il a fallu s’adapter), je me suis dit qu’il serait bon de découvrir un de ses films pré Taxi Driver.
Le déclic : Le déclic pour m’y mettre, c’est d’avoir entendu parler de cette scène :
De Niro, les Stones, mais surtout le personnage qui parle dans sa tête : c’est un peu l’équivalent d’un monologue intérieur littéraire dans son format visuel. Génie.
Ce que j’attends de ce visionnage : Voir les prémices de ce qui m’avait autant plus dans Taxi Driver, et une narration encore plus brute sur le thème du basculement des gens vers le côté obscur.
3. Victoria, Sebastian Schipper
Le frisson que m’apporte le cinéma est celui lié à l’expérience. Comme si pendant quelques heures, quelqu’un me prêtait littéralement ses propres yeux pour voir le monde (ce qui, au sens propre, serait tout bonnement horrifique… Imaginez que vous vous retrouviez avec les yeux d’un dépeceur de caniches…).
Sur ce principe, j’ai ainsi vécu des expériences de´licieusement hallucinées, comme avec le Climax de Noé, où la fascination et l’envie de m’arracher les yeux de malaise cohabitaient (d’où la notion importante que l’art est aussi une question de goût). Mais aussi des moments équivalents à ceux où l’on m’aurait promis une brioche pour me refourguer l’équivalent d’un croissant sec (référence à Midsommar, sa forme séduisante, et son contenu, que j’avais trouvé aussi vide que la gamelle d’un chien après 15 jours de diète).
Le déclic : Il vient du tournage de Victoria, réalisé en un plan séquence. Il faut imaginer un film fait en une seule prise de 2h14, et tout ce que cela peut impliquer en matière de ressources techniques, mais aussi quant à l’intention de création de son réalisateur (encore une personne qui ne devait pas s’imposer de faire pipi pendant les films).
Ce que j’attends de ce visionnage : Un film où la performance technique se met au service de la narration, et non l’inverse, où l’on me ferait voyager dans le Berlin des braquages comme Scorsese m’a fait voyager dans le New-York des gangsters.
4. Life, Anton Corbijn
Si vous ne pouvez pas voir Robert Pattinson sans l’imaginer en train briller de mille-feux tout en se nourrissant de sang de lapin, je vous invite chaudement à aller faire un tour du côté de The Lighthouse. Je songe très sérieusement que ce garçon a le potentiel d’un futur Leonardo di Caprio (Soit d’avoir autant de poches sous les yeux que de talent. Et c’est bien connu, les poches sous les yeux font le sel de l’homme).
Corbijn avait gagné à l’époque mon petit cœur d’emo avec son biopic Control sur Joy Division, et pas uniquement pour l’intérêt que je peux avoir pour le groupe. Tout y était : le parti pris d’un film en noir et blanc qui était une idée parfaite pour illustrer ce qu’est la musique de Joy Division, la prestation de Sam Riley bien sûr. En bref : un film à la réalisation assez ambitieuse pour un biopic, à la narration somme toute classique.
Le déclic : Le thème, qui est celui de l’importance portée aux détails. Qu’est-ce qui fait qu’un choix, un instant même infime, un truc que l’on remarque à peine fait parfois toute la différence (Comme le jour où j’ai réalisé que, si les petits morceaux de sucre sur certaines brioches tombaient, c’est parce que certains boulangers étaient radins niveau beurre) ? Si Life paraît moins hors norme sur le plan visuel que Control, partir d’une anecdote de l’histoire de James Dean pour en parler, c’est un peu comme apprendre ce qui se cache derrière les petits morceaux de sucre des brioches.
Ce que j’attends de ce visionnage : L’avènement du biopic du détail, plutôt que du film fleuve (aka ma déception sur Bohemian Rhapsody). Ceci peut ouvrir la porte à bon nombre de films intéressants ou loufoques. Je rêve de voir un jour un biopic sur Sean Bean, où au lieu de parler de son histoire, on s’attacherait à celle de ses personnages qui meurent presque tous atrocement à l’écran.
5. 4 luni, 3 saptamâni si 2 zile, Cristian Mungiu / 4 mois, 3 semaines, 2 jours/4 Months, 3 Weeks and 2 Days
Lorsque l’on découvre une culture, avec laquelle on avait jusque là autant de familiarité qu’avec le petit doigt de pied de Dracula (le bureau des clichés est de retour), on obtient l’effet mentionné le point 3 : celui de pouvoir enfiler une autre paire d’yeux (parce que les lunettes, c’est tellement 2020), d’embarquer pour un voyage vers d’autres références.
Exemple concret : il y a cette Roumaine, ma jumelle satanique, entrée dans mon existence il y a près de 6 ans déjà. Sans elle, j’aurais continué à considérer que les plats à base de chou se limitaient à la choucroute (Une petite publicité par ici pour ce délice qu’est le sarmale), que la musique du pays était majoritairement représentée par trois types (moldaves) qui chantaient « numa numa iei » sur une aile d’avion (et bien non), ou encore que la Roumanie était ce gros pays dont on confondait la capitale avec celle de la Hongrie, où les habitants vidaient les parcmètres en volant des poules (je vous rassure, le bureau des clichés est aussi fervent partisan de la blague de mauvais goût qu’il l’est des brioches).
Le déclic : La Roumanie avait effectué la conquête de ma personne non seulement par le biais de mon estomac (toujours le plus sûr moyen d’atteindre mon cœur), mais aussi par celui du partage de mon foyer (en plus elle aimait autant manger que moi). Alors l’envie de bâtir une connexion naturelle, allant au-delà du chou, s’est naturellement installée.
Le film 12 h 08 à l’est de Bucarest a été la première réalisation que j’ai dévorée. Il y avait cette forme visuelle plutôt froide, associée à un ton incisif et drôle, même quand les choses frôlaient l’absurdité (à l’image de ma chère amie, qui sous l’apparence abrupte de son héritage draculesque cache un petit cœur sensible et plein d’humour), avec une incursion dans les résidus de l’ancien régime, de son impact sur la société, par le biais de petites histoires dans la grande histoire. Mungiu faisait tout simplement partie d’un classique recommandée par mon vampire préféré (qui pour info aime l’ail et est végétarienne. À ce jour, aucun de nos proches ne s’est plaint d’une disparition inopinée de poulet).
Ce que j’attends de ce visionnage : Une autre entrée dans la société roumaine, par la porte du drame intime et non du sujet frontalement politique. Et peut-être une compréhension sur la place de la femme et de ses problématiques dans cette société.
6. Gummo, Harmony Korine
Alors non, je n’ai pas vu Spring Breakers. Plus parce que le sujet ne me parle pas vraiment qu’en raison de sa mise en scène d’enfants stars de Disney perverties (ce qui peut avoir son charme indéniable. Mais je suis d’une génération qui a connu l’époque où Britney Spears se rasait la tête en direct, alors bon, la barre de la subversion sur le sujet est déjà haute).
Le thème de l’adolescence et de ses enjeux a toujours été une source de fascination pour ma personne. Pour ses explorations des limites, la brutalité de la transition vers l’âge adulte, l’intensité de ses premières fois.
Harmony Korine, je l’associe à l’univers de Kids de Larry Clark. L’idée d’une adolescence à fleur de peau, traitée sans concession, avec toute cette violence émotionnelle et ses aspérités, un peu loin de mon univers de référence. C’est cette même vision, trash, et brute (et à moindre échelle) que j’avais retrouvée des années plus tard dans l’univers de la série Skins.
Le déclic : La contre-envie d’un Spring Breakers, et celle de voir des d’adolescents au physique et aux aspirations réalistes. Parce que l’adolescence, c’est aussi fait de ces périodes de creux, d’ennui, et pas toujours de choses fascinantes (regardez leur story actuelle sur instagram pour vous en convaincre).
Ce que j’attends de ce visionnage : Je me doute que le film ne va pas être une franche partie de rigolade (si c’est le cas, je songerai à m’exiler au fin fond de ma cave), et j’espère une échappée unique dans le monde du désenchantement adolescent. L’ancrage du film, un coin où le désoeuvrement et la crise sociale sont au rendez-vous, me paraît offrir un terrain d’expérience assez prometteur pour traiter ce sujet.
7. Paradies: Liebe, Ulrich Seidel / Paradis : Amour / Paradise : Love
Un film audacieux, selon mon humble opinion, cela peut-être une technique spécifique, des choix d’acteurs et de direction suprenants, une histoire bien ficelée.
Ou un sujet dont on se demande ce que le réalisateur a bien pu faire avec, tout en s’en sortant mentalement sauf. Vous feriez comment, vous, pour parler du tourisme sexuel et détailler sa gallerie de personnages sans tomber dans l’écueuil du sensationnalisme (raison pour laquelle les scénarii sur lesquelles je me sens de travailler sont plutôt liés à la culture des carottes en Basse-Normandie) ?
Le déclic : On est ici à l’inverse de ce que me semble être le film d’Harmony Korine (Un sujet bâteau = une réalisation choc, un sujet choc = une réalisation classique). En regardant la bande d’annonce, j’ai l’image d’un film plutôt sobre et beau dans sa forme (alors qu’il faut bien l’admettre, le sujet ne prête pas à la joliesse).
Ce que j’attends de ce visionnage : L’idée d’un film qui aborde des sujets lourds et subversifs, sans parti-pris. Qui nous rappelle que le cinéma est avant tout un art, avec de la beauté dans son traitement visuel, quelle que soit la réalité traitée dedans.
8. The General, Buster Keaton / Le mécano de la générale
Plus les années passent, et plus les choses qui se produisent sur nos écran semblent couler de source. À force de ne plus remuer une oreille lorsqu’une énième explosion fait s’envoler un vaisseau en éclat, je me suis dit qu’il était certainement temps de se replonger dans de très vieux classiques du cinéma.
C’est après avoir réprimé de nombreux haut le cœur en visionnant Prometheus de Ridley Scott, des suites de Star Wars qui ne faisaient que se reprendre, et subi au passage quelques films de super-héros à la qualité discutable, qu’il m’a semblé essentiel de retrouver mon âme d’enfant cinéphile.
Parce que je vois le cinéma avant tout comme une création de gosses, celle d’une grosse bourde qui donne lieu au premier trucage de l’histoire du genre par Méliès, un art où on peut s’inventer des costumes avec du papier toilette et des morceaux de carton, une bande-sonore en tapant sur des casseroles avec trois bouts de bois comme dans le Be kind, Rewind (Soyez sympas, Remboninez) de Gondry. C’est encore une fois de la magie, et des pâtes. Mais surtout de la magie.
Le déclic : Il semblait que Buster Keaton était tout indiqué, avec la passion d’enfant qu’il mettait en œuvre pour réaliser des blagues à l’écran, mais aussi parce que ses yeux s’accordaient en tout point avec celui de son bouledogue (chose qui m’émeut étrangement au plus haut point) :

Ce que j’attends de ce visionnage : Regarder un film, où Buster Keaton effectue lui-même des cascades sur un train en marche, à une époque où pour moi les gens en étaient encore à sa battre au pistolet à patates (je vous avais bien dit que la nuance était restée aux portes de 2020), et être capable de s’en émerveiller, est sans aucun doute le cadeau ultime que je souhaite de ce film (Et comme ce dernier est tombé dans le domaine public, il est disponible dans son intégralité sur Youtube. Noël avant et après l’heure).
9. Shichinin no samurai, Akira Kurosawa / Les Sept Samouraïs / Seven samurai
Si vous me parlez de cinéma japonais, j’en viendrai immédiatement à l’univers de l’animation de Miyazaki, le récent Shoplifters/Un air de famille, et le classique du Tombeau des lucioles (qui serait capable de faire tomber les défenses de n’importe quel cœur de pierre. Ou si ce n’est pas le cas, vous faites peut-être partie du comité des dépeceurs de caniches).
Ce qui démontre à quel point mon cerveau est un canvas d’une blancheur quasi virginale sur le sujet.
Le déclic : Je crois que l’un des acteurs de Game of Trones faisait mention de ce film comme une incursion dans un univers de héros aux valeurs contrastées, et ce pourquoi des personnages comme Jaime, Cersei ou Tywin Lannister ne pouvaient pas attirer une totale inimité ou sympathie. De plus, si l’on me connait, on sait que je n’ai jamais pu résister bien longtemps à une référence autour de l’univers de la série…
Ce que j’attends de ce visionnage : Des trahisons, des échecs, des combats épiques, des moments de bravoure, d’humanité, d’horreur, des anti-héros magnifiques et des héros qui se foirent. La vie, en somme, en noir et blanc et avec des samouraï dedans (ce qui n’y ajoute que du bonheur).
10. La Belle Époque, Nicolas Bedos
Fin 2020, je me replongeais dans des retrouvailles avec un certain type de cinéma français que j’avais délaissé pour un temps (pas par manque de goût, mais il se trouve que Netflix avait fini par occuper le seul créneau laissé vacant par mon amour dévorant des films en langues étrangères et mes préoccupations liées au Covid).
Et c’est là que Monsieur & Madame Adelman, le premier film de Nicolas Bedos m’avait mis un joli petit uppercut au creux de l’estomac. C’était drôle, irrévérent, beau, joyeux dans le déspoir, avec des dialogues ciselés qui reflétait la ligne »Tout sauf l’ennui ! » du personnage de Bedos dans le film. Et puis il y avait le fait qu’il y soit question de création, de littérature, d’ego, de la place de la femme de talent dans l’ombre d’un grand écrivain, et du rapport à la gloire. Je suis également (et surtout) tombée amoureuse du jeu et de la voix de Dora Tillier, sa manière de fumer avec détachement, de bouger à l’écran, la classe piquante qu’elle donne à son personnage. Cocorico, quoi.
Le déclic : Monsieur & Madame Adelman, donc, et le fait de m’être précipitée à la recherche d’un deuxième film de Bedos, aussitôt le visionnage terminé. Et bingo. Une histoire de cinéma dans le cinéma où l’on remet en scène les meilleurs moments de sa vie, l’idée de la création revisitée. Et Dora Tillier, encore.
Ce que j’attends de ce visionnage : Un moment de poésie, sans aucun doute, de réflexion sur l’amour et notre relation au souvenir. Et puis retrouver Dora Tillier (vous l’aurez compris).
11. (Oui, oui, parce que) Thx 1138, George Lucas
J’utiliserai ici le bonus alloué par mon cher ami A. (il connait bien ma tendance à ne plus pouvoir m’arrêter, comme lorsque je dois faire face à 4 cheesecakes).
Je suis une fan de Star Wars. Un peu en deuil, certes, mais une fan de Star Wars tout de même. J’ai toujours la même jubilation à prendre la voix de Dark Vador lorsque je me brosse les dents, de prétendre me battre avec un rouleau de papier toilette/sabre de Jedi.
Star Wars est une saga que je considére comme un classique pour enfants, un univers qui prend le temps de se construire (je fais référence aux épisodes IV, V VI, les plus anciens), à l’inventivité folle, avec cette réflexion sur cette fameuse part d’ombre qui sommeille en chaque héro. Et puis si les choses y finissent relativement bien (Semi-Spoiler: Quelqu’un y perd tout de même un membre, frôle l’inceste, et se retrouve solo à contempler sa sœur et son meilleur ami en train de fricoter), il y est aussi question d’échecs fracassants. Une bien belle leçon pour nos bambins, sans avoir à les prendre pour des demeurés (Cf : les épisodes I, II et II).
Le déclic : D’après le pitch de THX 1138, il est ici plutôt question de sujet d’adulte et de sobriété. Ce qui va à l’opposé de mon sentiment lors du visionnage du dernier Star Wars, et à la fin duquel j’avais décidé de renoncer à l’univers de George Lucas. Puis je me suis souvenue que lui aussi, un jour, avait été un gosse du cinéma, qui créait pendant des heures des maquettes inouies de vaisseaux, des mondes peuplés de petites créatures poilues. Alors peut-être qu’une nouvelle entrée dans son œuvre me ferait revenir à des sentiments plus doux (on ne déçoit pas une enfant, même de 35 ans, sans conséquences).
Ce que j’attends de ce visionnage : Une redécouverte de Lucas, tout simplement, et retomber amoureuse de son imagination débordante, avant sa folie de retoucher tous ses films pour y ajouter des effets a posteriori (pour info, ce film n’y échappe pas, je compte donc me plonger dans la version originale). Un film de science-fiction pour adulte, là où Star Wars s’adresse à mon âme de grand enfant.
Si je m’étais écoutée, ce classement aurait pu contenir 22 films (et vous rendre aveugle pour de bon).
Il donnera suite à une deuxième partie, au sujet de ces films que j’ai cette fois-ci regardé, et qui ont bousculé ma vision des choses et de l’existence (un point de vue véritablement subjectif, tout comme celui donné sur les dépeceurs de caniches. Mais par pitié, sans vous juger, mais un peu tout de même, je vous trouverais fortement dérangé si cette activité provoquait en vous la moindre once d’excitation).
Prenez soin de vous et de votre imaginaire. c’est important.
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